Zones défavorisées et ICHN : Benoît Biteau s'exprime.
Zones défavorisées et ICHN.
Le gouvernement illustre sa préférence pour les modèles agricoles industriels et productivistes.
Les agriculteurs qui évoluent en zones défavorisées, et donc éligibles à l’Indemnité Compensatoires pour Handicap Naturels (ICHN), au premier rang desquels les éleveurs extensifs en systèmes herbagés, comme en zone de montagne et en zone humide, peuvent depuis quelques semaines « apprécier » la préférence de ce gouvernement pour les modèles agricoles les plus intensifs, les plus industriels, et donc les plus polluants.
En effet, et à juste titre, l’Union Européenne a souhaité élargir l’éligibilité des zones défavorisées à des secteurs pour lesquels ce statut est pertinent. Cette volonté signifie pour l’Etat français de devoir faire des choix plus ou moins ambitieux.
Soit supprimer certaines zones ayant actuellement le statut de zone défavorisée pour pouvoir transférer les crédits de l’ICHN vers les nouvelles zones retenues par l’Union Européenne.
Soit l’Etat français fait le choix de réduire le régime d’aides octroyé aux grosses structures céréalières pour transférer ces crédits vers des modèles plus extensifs et maintenir l’ICHN sur les actuelles zones défavorisées, tout en pouvant la supporter pour les nouvelles.
Le problème de l’ICHN est en réalité le même sujet que le soutien à l’Agriculture Biologique et que la majoration des aides sur les 52 premiers hectares visant à amplifier les aides pour les petites structures agricoles, souvent paysannes et familiales.
Afin de pouvoir garder le cap sur ces trois sujets :
- Maintien de l’ICHN sur les actuelles zones défavorisées tout en assurant le financement de cette même ICHN sur les zones élargies.
- Evolution de la majoration sur les 52 premiers hectares des structures paysannes et familiales.
- Soutien de la dynamique de développement de l’Agriculture Biologique observée ces dernières années,
l’Union Européenne proposait à l’Etat français de transférer 13 à 14 % des aides du premier pilier de la Politique Agricole Commune (PAC), surtout mobilisé par les grosses structures céréalières intensives et polluantes, vers son second pilier, celui qui soutient les logiques de développement durable et les mesures agro-environnementales, afin de préserver ces dynamiques vertueuses.
Sous l’indécente pression de la FNSEA et de sa gouvernance verrouillée par les puissants céréaliers, en dépit des attentes sociétales et citoyennes d’une évolution de l’agriculture vers des modèles plus respectueux des équilibres, des ressources et de l’eau en particulier, des biodiversités sauvages et domestiques, du climat et de la santé, le gouvernement représenté par son ministre de l’agriculture Stéphane TRAVERT, n’a consenti qu’à un transfert de...4,2 %, n’autorisant pas la possibilité de maintien de ces dynamiques vertueuses .
Ce manque d’audace et de courage, cette allégeance aveugle aux thèses les plus corporatistes et clientélistes de la FNSEA :
- s’apparente à une injure aux structures familiales et paysannes qui auraient pu bénéficier de cette redistribution,
- éreinte littéralement la belle dynamique de développement de l’Agriculture Biologique pourtant attendue par la population,
- et assène le coup de grâce aux éleveurs évoluant en zones défavorisées et pourtant déjà lourdement touchés par les crises économiques d’un secteur d’activité déjà directement impactés par les logiques désastreuses des accords de libre échange. C’est d’ailleurs majoritairement dans ce secteur que sont constatés la majorité des suicides en agriculture, au rythme de 1 par jour !
Ce triste constat confirme l’inaptitude de ce gouvernement à s’affranchir de la cogestion avec la FNSEA, et donc à aspirer à un développement agricole conforme aux attentes sociétales, comme nous avions déjà pu le constater lors du récent débat sur le glyphosate.
Comment le modeste agriculteur, le besogneux éleveur en système herbagé dans ces zones défavorisées, peut-il d’ailleurs encore se revendiquer appartenir à ce syndicat fossoyeur de l’agriculture paysanne et familiale dépositaire du prestige gastronomique de notre pays et ayant écrit les plus nobles pages de l’histoire de l’agriculture de notre pays ?
Pourtant, au regard du poids économique des logiques curatives supportées par les contribuables déjà assommés par une pression fiscale de plus en plus insupportable pour réparer les dégâts de ce modèle agricole irresponsable, il y avait là une réelle opportunité pour donner un signe de reconnaissance à l’endroit des agriculteurs les plus vertueux et de respect des attentes de la société civile.
Encore loupé pour ce gouvernement engoncé dans ses logiques à court terme, dénuées d’approches globales et systématiquement au service de l’intérêt immédiat d’une minorité, au détriment de l’intérêt commun et de l’avenir des générations futures !
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